Fort-Stimson.                                331
II
L'an 1714, le mardi 25 feptembre, environ les neuf heures du foir, ed venu par-devant nous Céfar-Vincent Lefrançois, etc., Jean-Charles Eggiber, natif d'AIberftadt, fujet du roi de Pruffe, dit le Fort-Samfon, ayant pour fés exercices une loge dans le préau de la foire Saint-Laurent, affifté du lieur Jean Moque, maître à danfer de cette ville de Paris, pour lui fervir d'inter­prète de la langue allemande dans la plainte qu'il entend fendre contre François Ribière, limonadier, ayant boutique à la foire Saint-Laurent, rue de la Lingerie : Lequel Charles Eggiber, par l'interprétation qui nous a été faite de ce qu'il avoit à dire par le lieur Moque, nous a fait plainte et dit qu'ayant une loge pour fés exercices à la foire Saint-Laurent, François Ri­bière, ayant une boutique proche fon jeu, l'a prié de vouloir bien lui louer dans fon jeu un petit endroit pour vendre de la bière, du café et autres liqueurs, font convenus à 40 francs de loyer pour le refiant de la foire. Ledit Ribière lui a payé 17 francs fur et tant moins du loyer. Xe plaignant a pris quelques pintes de bière qui font à compter et à compenfer avec les perfonnes qu'il a fait entrer de fon autorité, au nombre de 45, pour voir fés exercices, aux places des galeries qui font de 20 fols pour chaque perfonne. En forte que ledit Ribière lui eft plus redevable que le plaignant qui peut lui devoir au plus la fomme de 20 livres fur laquelle eft à déduire les perfonnes qu'il a fait entrer et Ie furplus du loyer de la loge en queftion. Cependant ledit Ribière, étant ivre, s'eft avifé, lundi dernier, après les autres jeux de la foire finis, lorfque le plaignant étoit prêt à commencer fés exercices, de demander à Jean Herman, fon garçon, de l'argent. Jean Herman lui ayant fait réponfe que ce n'étoit pas le tems de compter enfemble, au lieu de fe fatisfaire de
cette réponfe, il a dit que le plaignant étoit un gueux, un fripon, un b.....
de f....., qu'il feroit arrêter lui et fon caroffe et qu'il lui feroit donner cent
coups de bâton ; ce qui fit une émotion dans fon jeu fi grande qu'il ne put pas faire fés exercices. Et, étant defcendu en bas, l'ayant voulu faire fortir, ledit Ribière prit le plaignant au collet. Tout ce qu'il put faire, ce fut de s'en débarraffer, lui tenant fa perruque, il s'échappa et tomba à la porte du jeu. Les perfonnes qui attendoient le fpectacle et à voir fés exercices voulurent s'en aller; ce qui obligea le plaignant de rendre l'argent, de leurs places et lui a fait un tort de plus de 200 livres. Et comme journellement il eft infulté dudit Ri­bière qui lui doit bien plus qu'il ne peut redemander, bien loin de lui étre rede­vable; c'eft ce qui l'oblige de venir par-devant nous nous rendre plainte (1).
Signé : Moque.
(Archives det Comm.> no 3826.)
(1) Dans l'information qui fut faite ensuite de cette plainte, par le commissaire Lefrançois, on entendit entre autres témoins, Étienne Lefèvre, voltigeur au jeu de la danse de corde du sieur Saint-Edme, demeurant faubourg SaintLazare aux 13 cantons, âge dc'34 ans.